Enrico Pieranunzi : 88 shades of blue (note)


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Interview d’après concert à Flagey, où l’on évoquera sa rencontre avec d’autres musiciens belges. Certains étaient d’ailleurs venus le saluer, comme Nathalie Loriers, Antoine Pierre et Jean-Paul Estiévenart. Une rencontre qui reflète bien aussi cette chaleur humaine propre aux musiciens italiens : quand vous lui dites que vous l’aviez rencontré pour une interview, il y a vingt ans, après son concert solo au festival Jazz au Château d’Oupeye, Enrico vous répond qu’il s’en souvient. Une réponse «bateau»: tout le monde se souvient de tout le monde. Mais, quand il vous cite le titre de l’article (« L’élégance en 88 touches »), vous vous rendez compte qu’il est sincère : Merci.

Propos recueillis et traduits par Claude Loxhay
Photos: Jacky Lepage

A 65 ans, Enrico Pieranunzi a croisé le gotha du jazz international : des Américains comme Chet Baker (albums « Soft Journey », « The Heart Of The Ballad »…), Art Farmer (« Isis »), Jim Hall (« Duologues »), Lee Konitz (« Solitudes »), Phil Woods (« Elsa »), Charlie Haden (« Silence », « First Song »), Chris Potter (« Fellini Jazz ») mais aussi des Européens tels Enrico Rava (« Nausicaa »), Philip Catherine (« Alone Together »), Kenny Wheeler (« Fellini Jazz »), Dino Piana (« Piana-Valdambrini Sextet »), Rosario Giuliani (« Evans Remembered »), Gabriele Mirabassi (« Raconti Mediterranei »), Bert Joris (« Don’t Forget The Poet »), Bert van den Brink (« Daedalus Wings »). S’il a multiplié les enregistrements en solo, en duo (avec Marc Johnson) et en trio avec des rythmiques de rêve, Marc Johnson/Joey Baron (« New Lands »), Marc Johnson/Paul Motian (« Untold Story ») et dernièrement Scott Colley/Antonio Sanchez (« Permutation », « Stories »), il ne s’est quasiment jamais produit avec un big band : ce qui rend unique ce projet avec le Brussels Jazz Orchestra et Bert Joris (album « The Music of Enrico Pieranunzi », WERF).

Vous connaissez Bert Joris depuis longtemps…

C’est exact. On s’est rencontré en Hollande, en 1999, pour enregistrer un album sur le label de Hein van de Geyn : « Don’t Forget The Poet », un disque en quintet avec Stefano d’Anna au saxophone et Hans van Oosterhout à la batterie. A cette époque, je ne connaissais pas encore Bert, je l’ai découvert à cette occasion. C’était un beau projet autour de certaines de mes compositions : Coralie, Newsbreak, Hindsight, Seaward, With My Heart In A Song… Par la suite, je suis resté en contact. Je l’ai appelé, en 2003, autour du projet Fellini, avec Tony Malaby et Marc Johnson. Paul Motian devait faire partie de la formation. Mais j’ai reçu un mail : Paul devait passer des examens pour le coeur. Il n’a pas pu venir, c’est Marcello Di Leonardo qui l’a remplacé (sur l’album, les solistes sont Kenny Wheeler et Chris Potter). J’ai encore appelé Bert à d’autres occasions. Il possède une très belle sonorité et il est un excellent arrangeur.

Connaissiez-vous le Brussels Jazz Orchestra ?

Je le connaissais bien sûr : le Brussels Jazz Orchestra jouit d’une grande réputation. Comme je le dis dans les liners notes de l’album, les big bands poursuivent une grande tradition dans l’histoire du jazz. Mais, dans le monde, il n’y a plus maintenant que quatre ou cinq réellement grands orchestres, le BJO en fait partie. J’ai rencontré les musiciens du BJO par chance. Je jouais à New-York avec mon trio, Scott Colley et Antonio Sanchez, et, eux aussi, jouaient au Blue Note, avec Kenny Werner et, en invité, Chris Potter. Les musiciens américains viennent fréquemment en Europe mais l’inverse se produit rarement : alors quand un big band européen se produit à New-York, c’est un véritable événement. Je savais aussi que le BJO avait participé à la musique du film « The Artist », que j’ai beaucoup aimé. Il y a deux ans, Frank Vaganée m’avait contacté pour me proposer de jouer non seulement avec le BJO mais d’interpréter mes compositions. J’ai accepté et Bert Joris est très vite apparu comme l’arrangeur idéal.

Comment avez-vous choisi le répertoire ?

J’ai notamment choisi des thèmes que j’avais déjà arrangés pour quintet, des compositions, entre autres, de l’album « Don’t Forget The Poet », comme Persona, Newsbreak, It Speaks For Itself, With My Heart In A Song. Fellini Waltz que j’ai enregistré en quintet comme en trio, je l’ai inclus dans le répertoire parce que c’est un morceau qui reflète bien une certaine sensibilité italienne, comme Toots a l’habitude de dire à propos de sa musique : « between a smile and a tear ». Tierra Nativa (le morceau ne figure pas sur l’album mais était joué en rappel, lors du concert), est un des morceaux que j’ai enregistrés pour l’album « Live At Birdland » en quintet. J’ai choisi des morceaux que j’ai souvent joué comme Coralie qui figure sur « Don’t Forget The Poet » avec Bert ou Nausicaa avec Enrico Rava.

Il y a aussi deux compositions que vous avez jouées avec votre nouveau trio…

Oui, Within The House Of Night et Distance From Departure, deux thèmes qui figurent sur l’album « Permutation ». Ce trio avec Scott Colley et Antonio Sanchez, c’est une idée du producteur du label Cam Jazz, en partie, parce qu’Antonio a un contrat exclusif avec eux. Nous avons enregistré deux albums ensemble : « Permutations » en 2012 et « Stories » en 2014. Mais ce n’est pas facile de trouver une date pour jouer avec Antonio, il est très demandé.

Vous n’avez pas souvent joué avec un big band. Je sais seulement que vous avez joué avec le Jazz Orchestra de l’Université de Berne…

C’est exact, un projet mené par Mathias Wenger, un jeune saxophoniste, avec un orchestre semi-professionnel. Le problème, avec les big bands, c’est la masse sonore qu’ils peuvent dégager, le piano risque d’être étouffé. C’est pour cela que je préfère souvent jouer en duo ou en trio, au maximum en quintet comme pour « Don’t Forget The Poet » et « Fellini Jazz » ou en sextet comme pour « Evans Remembered », avec Rosario Giuliani, Gabriele Mirabassi et Fabrizio Bosso. Heureusement, le problème ne se pose pas avec le BJO et les arrangements tout en nuances de Bert. Un autre rêve serait de développer un projet avec des cordes, comme Bert l’a fait avec l’album « Dangerous Liaisons ».

Vous avez joué avec d’autres musiciens belges, comme Philip Catherine…

Oui, j’ai enregistré deux albums avec lui, « Along Together » et « Concert In Cap Breton ». Philip est un grand mélodiste. J’ai fait plusieurs concerts avec lui et avec Philip Aerts, un excellent contrebassiste et puis avec Antoine Pierre. C’est aussi un très bon musicien. J’ai écrit une lettre de recommandation pour qu’il aille étudier aux Etats-Unis. Il a rejoint une école où il peut travailler avec Antonio Sanchez. On devrait avoir davantage de contacts entre musiciens européens. Au Gaume Jazz Festival, cet été, j’ai aussi découvert un fantastique jeune trompettiste , Jean-Paul Estiévenart : il est phénoménal. J’ai joué là-bas avec lui, Philip Aerts, Antoine et son père. Je connais bien aussi Nathalie Loriers : « I love Nathalie », elle a une grande sensibilité.

Elle vous a dédié une composition…

Je sais : Canzoncina, mais, malheureusement, je ne l’ai pas encore entendue. Je devrais mais je ne sais pas sur quel album figure cette composition.

Sur deux albums, « Les trois petits singes » et « Le peuple des silencieux »…

Je crois qu’elle parle de cette dédicace dans ses liner notes. Elle m’a dit que j’étais un de ses « héros »…(avec un sourire malicieux, il ajoute…) Je me ferai faire une statue pour qu’elle la mette sur son piano.

 

Article publié par jazzaround


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